Avec ses longs kilomètres de côtes, le Québec offre de belles possibilités de faire de l’aquaculture.
Pourquoi encourager la mariculture?
Quelles sont les espèces qui grandissent dans les eaux québécoises?
Commençons par une introduction.
Avec ses longs kilomètres de côtes, le Québec offre de belles possibilités de faire de l’aquaculture.
Pourquoi encourager la mariculture?
Quelles sont les espèces qui grandissent dans les eaux québécoises?
Commençons par une introduction.
Durée de la vidéo : 3 minutes et 16secondes
Lieux et dates de tournage : Gaspésie, 2022 et Salon Fourchette bleue 2023
Extrait d’entrevues réalisées par : Jean-Sébastien Laliberté et Maylis Persoons, muséologues à Exploramer
Vidéaste et monteur : Guillaume Lévesque, Les productions de la Morue Salée
Personnes interviewées :
Crédit : Exploramer, 2024
[Musique en fond sonore.]
[Vue sur des bateaux amarrés à quai, puis sur un ponton en bois.]
[Plan sur Eric Bujold qui parle, assis en extérieur avec un bateau en arrière-plan.]
Eric Bujold : Bonjour, moi je suis Eric Bujold, donc je suis mariculteur, propriétaire de la Ferme maricole du Grand Large, qui fait la mise en marché des huîtres William B et des moules, à Carleton-sur-Mer.
[Vue sur le quai puis plans rapprochés sur différents équipements du bateau et sur une poulie de bateau puis retour sur Éric.]
Les huîtres, les moules aussi, c’est comme du vin, donc dépendamment que tu vas changer de région, ton goût va changer. Donc les amateurs vont être capables, surtout dans les huîtres, de faire la différence entre une huître qui vient d’ici et une huître d’ailleurs. Et nos huîtres ont la particularité d’être vraiment plus salées que ce qu’on retrouve dans l’Est du Canada. Donc ils sont agréablement recherchés.
[Vue sur des huîtres dans une cage puis sur une main.]
Marie-Hélène Rondeau : Oui, bien mon nom c’est Marie-Hélène Rondeau.
[Plan sur Marie-Hélène Rondeau qui parle.]
Je suis biologiste et chargée de projets à l’AGHAMM.
[Vue sur un panneau avec le logo de l’AGHAMM et défilement vers le bas sur des photos noir et blanc puis retour sur Marie-Hélène.]
La mission à l’AGHAMM, c’est vraiment de favoriser la saine gestion des ressources aquatiques et océaniques des communautés pour lesquelles on travaille. Soit les Mi’gmaqs de Gesgapegiag et de Gespeg, et la Nation Wolastoqiyik Wahsipekuk, qui est anciennement appelée les Malécites de Viger.
[Musique s’intensifie.]
[Vue sur un panneau avec le logo Salaweg puis vue sur un sachet d’épices à poisson et un sachet d’épices à viande.]
[Vue sur un pot de relish de mer et un pot de mélange à tartare.]
Quand on fait de l’aquaculture, c’est comme si on jardinait, dans le fond.
[Retour sur Marie-Hélène.]
Donc, on vient ensemencer des filières en mer.
[Vue sur la mer.]
Et on vient créer des nouveaux habitats où il n’y en avait pas.
[Vue sur une filière d’algues remontée hors de l’eau puis sur une personne qui coupe les algues de la filière.]
Et donc, on ne retire pas des algues qui existeraient déjà dans la mer. Dans cette optique-là, c’est une activité qui est durable parce qu’on ne vient pas enlever une ressource sauvage.
[Musique s’intensifie, plan sur Sandra Autef qui coupe des algues de la filière.]
Sandra Autef : Mon nom, c’est Sandra Autef. Je suis chargée de projet en algoculture à l’AGHAMM.
[Vue sur des mains gantées qui tiennent une algue.]
En ce moment, on est sur le Nignag, qui est le bateau-école de l’AGHAMM sur lequel Peter Hackett est capitaine.
[Plan sur Sandra, assise sur le bord du bateau puis sur le visage d’un jeune apprenant.]
Et à chaque saison, en fait, on embarque deux jeunes des communautés, membres de l’AGHAMM, qu’on appelle nos apprenants, qui sont là pour se former en pêche et aquaculture.
[Plan sur l’avant du bateau vu de derrière, avec deux personnes présentes puis sur la mer qui défile.]
Jean-Philippe Hébert : Jean-Philippe Hébert, président chez Fermes marines du Québec.
[Plan sur les installations intérieurs de Fermes marines du Québec.]
Fermes marines du Québec, c’est premièrement une écloserie.
[Plan sur Jean-Philippe Hébert qui parle, en tenue de travail, devant un bassin.]
Ça sert à la reproduction d’organismes marins. On a des permis pour 22 espèces, 9 espèces d’algues. À peu près toutes les espèces commerciales qui sont consommées au Québec, que ce soit du homard, du pétoncle. Notre dernier projet de R&D, puis celui sur lequel on compte plus pour la commercialisation, c’est le loup tacheté.
[Plan sur des loups tachetés dans l’eau.]
[Musique s’intensifie.]
[Plan sur Élisabeth Varennes parlant avec un homme.]
Élisabeth Varennes : Je suis Élisabeth Varennes, la directrice et cofondatrice de Seabiosis.
[Plan sur les pots de produits Seabiosis puis sur Élisabeth qui parle.]
Nous sommes situés à Carleton-sur-Mer, en Gaspésie. J’ai fait mes études, j’ai étudié beaucoup l’aquaculture. C’est très méconnu au Québec.
[Plan sur des bouées posées sur l’eau, puis sur une femme qui récupère une grande cage à bord d’un bateau et finalement sur une algue accrochée sur une filière.]
Même l’aquaculture de moules, ça fait partie des méthodes de culture animale, végétale les plus éco-responsables qui existent.
[Logo Exploramer.]
[Musique de fond sonore s’arrête.]
La pratique se définit comme la culture, l’élevage d’animaux ou de plantes dans l’eau douce, saumâtre ou salée.
Elle peut se faire dans des bassins, comme c’est souvent le cas pour les poissons, ou en milieu naturel. Une culture en eau douce est appelée « dulciculture ». En eau salée, il s’agit de « mariculture ».
Et puis, la dénomination peut aussi dépendre de l’espèce.
En 2022, dans les eaux salées du Québec, les espèces cultivées étaient la moule bleue, l’huître américaine, la laminaire sucrée, l’oursin et le pétoncle, bien que les projets de pectiniculture soient toujours expérimentaux. Des essais ont eu lieu pour l’élevage de loups tachetés et pour la culture d’autres types d’algues.
En eau douce, les élevages concernent principalement la truite arc-en-ciel, l’omble chevalier et l’omble de fontaine.
Autonome, ou pas.
En élevage, certaines espèces demandent plus de soins que d’autres. Les algues et les mollusques, par exemple, sont assez indépendants puisqu’ils s’alimentent eux-mêmes grâce aux nutriments présents dans l’eau, pour l’un, et au plancton, pour l’autre. Les poissons d’élevage, quant à eux, dépendent de l’humain pour avoir accès à leur nourriture.
Dans les eaux du Saint-Laurent, la mariculture est une pratique récente.
Différentes espèces ont fait l’objet d’essais au cours des années. Certaines connaissent un gros succès, d’autres font face à quelques défis.
1970
Les Madelinots font des premiers essais de culture de moules bleues.
1984
Le premier permis commercial de mytiliculture est délivré aux Îles de la Madeleine.
1987
La culture de la moule bleue s’étend en Gaspésie et en Côte-Nord.
1992
Des premiers essais de culture de laminaires à long stipe sont effectués à Pointe-au-Père par l’Institut national de la recherche scientifique Océanologie.
1994
Développement de la culture du pétoncle en Côte-Nord.
1998
La pectiniculture s’étend aux Îles de la Madeleine. En 2024, cette culture reste expérimentale dans les régions côtières du Québec.
En 1998, les Madelinots tentent également la production de myes. Celle-ci s’arrête en 2013, en raison, notamment, de défis technologiques et environnementaux.
2002
Les premiers permis pour la culture d’oursins sont délivrés au Bas-Saint-Laurent et en Côte-Nord. En 2024, une seule exploitation demeure du côté de Rimouski.
2006
Une première ferme marine entreprend la culture d’algues dans la baie des Chaleurs. Depuis, les techniques et processus s’améliorent, s’adaptent au climat québécois et deviennent plus rentables.
2010
Durant les années 2010, la production de la moule bleue est fortement touchée par la prédation des canards de mer. Plusieurs entreprises cessent leurs activités au cours de la décennie.
Volume de la production maricole au Québec entre 1996 et 2020
Source : Institut de recherche en économie contemporaine, 2023
2012
Après une tentative non aboutie en 1998, la culture d’huître est relancée. Celle-ci est un succès. La valeur de la production maricole québécoise reprend du poil de la bête.
Valeur de la production de moules et d’huîtres au Québec entre 2009 et 2020
2022
L’industrie représente 14 entreprises maricoles actives et 95 emplois au Québec.
L’exploitation d’un site d’aquaculture commence par l’obtention d’un permis, délivré par le MAPAQ.
Une fois les permis acquis, les aquaculteurs suivent globalement le même cycle: de la naissance de l’espèce jusqu’à sa récolte. Une petite variation tout de même: les techniques et infrastructures sont adaptées aux espèces.
L’aquaculture multitrophique intégrée, qu’est-ce que c’est?
Il s’agit d’un élevage simultané de plusieurs espèces telles que des poissons, des bivalves comme des moules, des concombres de mer, de même que des algues. Ce type de culture reproduit le fonctionnement d’un petit réseau trophique. Les bivalves et les algues tirent profit des déchets des poissons, ce qui limite la pollution du milieu marin.
Au Québec, plusieurs sites maricoles ont le potentiel d’être exploités pour l’algoculture.
Même si le marché est plus développé en Asie, la pureté des eaux canadiennes offre un avantage sur la qualité des algues récoltées. En 2018, trois fermes d’algues existaient au Québec, cultivant principalement de la laminaire sucrée.
Comment se déroule la culture sur filière?
Durée de la vidéo : 4 minutes et 58 secondes
Lieux et dates de tournage : Gaspésie, 2022 et 2023 et Salon Fourchette bleue 2023
Extrait d’entrevues réalisées par : Jean-Sébastien Laliberté et Maylis Persoons, muséologues à Exploramer
Vidéaste et monteur : Guillaume Lévesque, Les productions de la Morue Salée
Personnes interviewées :
Crédit : Exploramer, 2024
[Musique de fond.]
[Vue sur un panneau avec des algues imprimées puis sur Marie-Hélène Rondeau, devant le tableau.]
Marie-Hélène Rondeau : Sur ce tableau-là, des algues marines commerciales du Québec, la plus commune et la plus populaire, on va dire, c’est la laminaire sucrée, la Saccharina latissima.
[Plan rapproché sur une laminaire sucrée.]
Cette algue-là, c’est celle qui est la plus connue en termes de culture.
[Retour sur le tableau des algues et le texte décrivant la Saccharina latissima puis celui sur l’Alaria esculenta.]
Et on cultive aussi, sur notre site aquacole, l’alarie succulente, qui s’appelle aussi Alaria esculenta.
[Plan sur une alaria succulente tenue entre deux mains sur une plage.]
Celle-là est super intéressante en termes de texture et de goût, mais elle est un petit peu moins connue.
[Plan sur une personne en combinaison de plongée tenant un bouquet de laminaires sucrées.]
Donc, on a environ 70 % de nos filières qui sont de la laminaire sucrée et 30 % qui sont de l’alarie succulente à l’heure actuelle.
[Plan sur une feuille d’algue rouge tenue entre deux mains.]
Sinon, dans les algues sur lesquelles on a fait des tests de culture, on a la Palmaria palmata. C’est une algue rouge qu’on appelle aussi la main de mer palmée ou la dulse. Elle est excellente quand elle est séchée.
[Plan sur Marie-Hélène, devant le tableau des algues.]
Et on a fait quelques tests aussi sur notre site aquacole avec cette algue-là.
[Musique s’intensifie.]
[Vue sur l’eau puis sur un capitaine de bateau à l’intérieur du poste de commandes.]
[Plan sur des algues sur filière sorties de l’eau puis qui se font couper au couteau et sur Sandra Autef qui coupe des algues de la filière.]
Sandra Autef : L’intérêt de produire des algues dans le Saint-Laurent, c’est la rapidité de croissance par rapport à toute autre culture de mollusques, où on parle de plusieurs années.
[Musique de fond s’arrête.]
Ça a été démontré dans plusieurs études que cultiver des algues permet de limiter l’érosion côtière.
[Plan sur une côte.]
Ça reste aussi que ça peut être des supports d’habitat pour différentes espèces pendant que les algues sont là.
[Plan sur l’eau vue de l’arrière du bateau.]
On a parlé de séquestration de carbone.
[Vue sur la filière remontée à bord du bateau et Sandra et un homme qui coupe les algues.]
On parle aussi de diminution de l’effet d’acidification des océans. Il y a vraiment beaucoup d’intérêts à cultiver des algues sur un site.
[Vue sur un carnet de notes puis sur un appareil tenu dans une main au bord du bateau.]
[Plan sur Sandra vue de profil.]
25.1 et 6.3. On prend la salinité et la température régulièrement parce que c’est vraiment des paramètres qui sont importants à contrôler puis qui peuvent expliquer beaucoup de choses sur la culture en général.
[Musique de fond reprend.]
[Plan sur une filière d’algues sortie de l’eau.]
Éric Tamigneaux : Quand on met les petites plantules en mer, il faut qu’elles soient en bonne santé, il faut qu’elles soient bien accrochées à leurs cordes.
[Plan sur Éric Tamigneaux en visioconférence.]
Il faut qu’elles aient été gavées de nutriments pour avoir des réserves. Et à ce moment-là, ce qui va advenir, ça va dépendre essentiellement des conditions environnementales en milieu marin. Donc on essaye de bien cibler la période de transfert en mer. Pour qu’elles aient ni un coup de chaud ni un coup de froid, pour ne pas qu’elles soient étouffées par les compétiteurs. Parce que dès qu’on met une corde ou une bouée ou n’importe quel objet en mer, il y a tout un tas de larves, d’espèces invertébrées qui se cherchent une maison sur laquelle se fixer ou un terrain sur lequel construire leur maison.
[Plan sur une filière d’algues qui passe dans une poulie.]
Et donc quand on leur fournit un nouveau terrain qui est vide, tout le monde veut s’installer là. Donc il faut éviter ces périodes où il y a beaucoup de larves d’invertébrées. Il ne faut pas qu’il y ait de tempêtes qui arrachent les petites plantules d’algues.
[Retour sur Éric.]
Il faut les garder dans de bonnes conditions. Puis, au fur et à mesure qu’elles grandissent, elles deviennent plus résistantes, elles sont mieux accrochées à la corde, donc il y a de moins en moins de risques de perte.
[Vue sur un bac rempli d’algues et une personne à côté qui en sélectionne une.]
Sandra : En fait, ici, on a vraiment un beau spécimen de laminaire sucrée. En fait, on voit que l’algue a plusieurs parties.
[Plan sur Sandra, montrant les différentes parties d’une laminaire sucrée.]
On parle ici du crampon.
[Plan rapproché sur le crampon, le stipe puis la feuille de l’algue.]
En fait, c’est la partie avec laquelle elle vient se fixer dans le milieu naturel, souvent à des rochers. Dans notre cas, elle vient se fixer sur une corde. Ici, on a vraiment un beau stipe, c’est un peu comme une branche. Et on a ce qu’on appelle la fronde donc, ou la feuille, aussi appelée la lame de la laminaire, donc vraiment la grande fronde.
[Plan sur l’extrémité de l’algue posée sur le bord du bateau.]
Et au bout, on parle souvent de zone apicale. Nous autres, c’est vraiment une partie qui est souvent un peu détériorée. Donc on va avoir tendance à éliminer, pour nos produits de qualité alimentaire.
[Plan sur Sandra qui tient une laminaire sucrée.]
Donc en fait, ce que j’amène après ça au séchoir, c’est vraiment juste la fronde. Si j’amène 140 kg de fronde, j’ai comme 14 kg de séché qui ressort.
Les stipes, en fait, on les garde en collaboration avec une entreprise qui fait de la transformation d’algues qui s’appelle Seabiosis. En fait, eux autres, ils font des sortes de pickles, genre, avec les stipes, donc on leur garde pour eux.
[Musique de fond s’intensifie.]
[Plan sur un homme parlant devant la bannière promotionnelle de Seabiosis puis sur plusieurs pots de Seabiosis dans une boite et sur un pot de salade Kombu.]
Élisabeth Varennes : Donc on a notre salade d’algues. On fait aussi des algues marinées parce qu’on veut valoriser l’entièreté de l’algue. Donc on fait mariner la feuille.
[Plan Élisabeth Varennes qui parle.]
Mais aussi dans le produit on fait mariner la tige, le stipe de l’algue, qui n’était pas utilisé jusqu’à maintenant. Mais en culture on a le stipe, donc autant l’utiliser.
C’est une méthode de culture qui est une des plus éco-responsables parce qu’on n’ajoute aucun engrais, on n’ajoute…
Ça prend pas de terre qui pourrait servir à d’autres choses.
[Plan sur une filière d’algues sortie de l’eau puis sur des personnes qui coupent les algues sur la filière.]
C’est des algues natives qu’on fait juste pousser dans l’eau.
[Autre vue sur les personnes qui coupent les algues puis sur Sandra qui tient une algue avec le soleil en arrière.]
Donc, c’est vraiment, moi, c’est… Je l’ai aussi à cœur de développer la culture d’algues en parallèle de la cueillette.
[Logo Exploramer.]
[Musique de fond s’arrête.]
Se procurer de jeunes
pousses d’algues
Les entreprises d’algoculture peuvent s’approvisionner en jeunes pousses d’algues de deux manières:
Mise à l’eau
À l’automne, les cordelettes remplies de jeunes algues sont placées sur les sites de culture.
Elles sont plongées jusqu’à 7 m de profondeur pour ne pas être affectées par les glaces durant l’hiver.
Avide de lumière
Au printemps, lorsque l’eau se réchauffe, les filières sont remontées entre 2 m et 4 m de profondeur afin de pouvoir capter toute la lumière et les nutriments nécessaires à la croissance des algues.
Si ces dernières grandissent doucement pendant l’hiver, ce n’est pas le cas des mois d’avril à juin, durant lesquels la laminaire peut s’allonger et prendre jusqu’à 4 cm en une seule journée.
La récolte
En seulement quelques mois, la laminaire atteindra jusqu’à 1 m de long. Une belle croissance, n’est-ce pas?
En juin, la course contre la montre commence. Il faut ramasser les algues avant que les Bryozoaires ne gâchent la culture. Ces petits invertébrés envahissants colonisent les feuilles des algues et compliquent sérieusement le travail de nettoyage en usine.
La culture de moules bleues a vécu bien des aventures au Québec.
Si les entreprises de mytiliculture étaient nombreuses avant les années 2010, il n’en restait plus que quatre en 2022. Les canards de mer, entre autres, n’ont fait qu’une bouchée de nos belles moules.
Plusieurs méthodes de culture de moules sont possibles. Voici l’exemple du boudinage.
Se procurer des
moules juvéniles
Au printemps, des cordes, appelées collecteurs, sont placées en mer, à la période de reproduction des moules.
Les larves naissantes s’y fixent et grandissent dessus pendant quelques mois. Ces moules juvéniles s’appellent le naissain.
Le boudinage
À l’automne de l’année suivante, les collecteurs sont récupérés et les petites moules sont retirées.
Elles mesurent autour de 1 cm. Elles sont triées et placées dans des filets en forme de tube, ressemblant à des boudins. C’est l’étape du boudinage.
Patience et
croissance
Les boudins sont ensuite placés en mer sur des filières, entre 5 m et 10 m sous la surface pendant 18 à 24 mois.
Ce n’est toutefois pas une période de repos pour le mytiliculteur. Pendant tout ce temps, il donne de l’amour à ses moules. Il les surveille, les nettoie pour éviter la présence de salissures et de prédateurs, et les réorganise pour optimiser leur croissance.
Pendant l’hiver, les filières peuvent être descendues plus profondément pour éviter les bris causés par les glaces.
La bonne dose d’agitation
Un peu de courant donnera des moules bien charnues car elles filtreront plus d’eau et donc plus de nourriture. Par contre, s’il y a trop d’agitation, elles développeront un byssus plus dense pour rester bien accrochées. Le travail de nettoyage sera alors plus ardu.
Force et
douceur
Quand elles atteignent de 5,5 cm à 6 cm de longueur, les moules sont prêtes à être récoltées.
Les moules sont alors remontées et détachées des boudins. Selon la densité de moules sur un boudin, celui-ci peut devenir très lourd et peser environ 30 kg. En sortir plusieurs à la suite demande une certaine force.
Avant la mise en vente, les moules sont brossées ou simplement rincées et les byssus sont retirés.
Ces manipulations doivent se faire en douceur car la coquille des moules est fragile en raison de leur croissance relativement rapide sur la filière.
Produire des huîtres saines et goûteuses demande une attention particulière.
Avoir de la patience est également indispensable puisque ce mollusque prend de 3 à 4 ans pour se développer, avant de pouvoir être commercialisé. Cet aspect n’a toutefois pas empêché aux huîtres de devenir l’espèce vedette de la mariculture québécoise. En 2022, sept entreprises produisaient des huîtres au Québec.
Quelles sont les étapes de la culture d’huîtres?
Durée de la vidéo : 4 minutes et 44 secondes
Lieu et date de tournage : Îles-de-la-Madeleine, 2023
Extrait d’entrevues réalisées par : Maylis Persoons, muséologue à Exploramer
Vidéaste et monteur : Guillaume Lévesque, Les productions de la Morue Salée
Personnes interviewées :
Crédit : Exploramer, 2024
[Musique de fond.]
[Vue sur les côtes puis sur l’arrière d’un bateau.]
Alain Longuépée : Cultures du Large, c’est les huîtres.
[Plan sur la fenêtre de la cabine du bateau puis sur une fille aux commandes à l’arrière du bateau.]
Donc on va directement mettre en mer les naissants, les bébés huîtres, au large des îles vers la Baie de Plaisance, entre les îles et l’Île d’Entrée.
[Vue sur le nom du bateau « Les Îles brisées par les vagues » puis sur un passage sous un pont, depuis le bateau.]
Jusqu’à l’âge adulte, qui va à peu près jusqu’à 2 ans et demi, 3 ans, pour atteindre 2,5 pouces. Ensuite, on les amène se reposer dans notre spa, qui est la Baie du Cap-Vert, du côté de Fatima, entre Havre aux Maisons et Fatima.
[Plan sur Alan Longuépée avec un ponton de bois et des bateaux amarrés à quai en arrière-plan dans la brume.]
On les amène se reposer là-bas. Ensuite, elles arrivent chez nous, ici, à la Pointe-Basse, à Havre aux Maisons. Et là, elles sont prêtes à déguster pour les gens des îles et pour le Québec.
[Plan sur les côtes puis sur un homme marchant dans l’eau.]
Maggie : C’est ça, là, on peut voir, on arrive dans le site aquacole.
[Différentes vues plus ou moins rapprochées sur des bouées noires à la surface de l’eau.]
Toutes les bouées noires qu’on voit, là, c’est toutes nos huîtres. Toutes les cages sont marquées sur le GPS, donc grâce à la tag qu’on a sur les bouées avec le numéro. Mais le capitaine, lui, quand on dépose une cage, il va tout de suite la noter avec un point GPS, avec le numéro de la cage.
[Plan d’une cage d’huîtres sortie de l’eau par Maggie et un homme.]
Ici, au large, c’est sur des filières.
[Plan sur le visage de l’homme, vue de profil.]
Donc, nous, on a 189 filières avec 30 à 40 cages dessus de 2000 huîtres.
[Retour sur le plan d’une cage d’huîtres sortie de l’eau et posée dans le bateau.]
Personne n’a le droit de pêcher ici. Nous, on a le permis d’aquaculture dans cette zone-là, puis c’est juste nous qui avons ça. C’est un bail de 99 ans.
[Plan sur Maggie à côté de la cage puis retour sur Alain.]
Alain : L’avantage aux îles : la qualité de la mer est excellente côté propreté. On espère et on souhaite que ça continue dans les années futures. C’est toujours un risque.
[Plan sur Maggie à bord du bateau.]
Maggie : Donc ici, on a une cage commerciale d’huîtres. Donc les huîtres, on les met ici, pour commencer, quand on va les chercher du Nouveau-Brunswick. On les met dans la baie, c’est comme la pouponnière. Donc elles vont vivre ici environ une saison. Ensuite de ça, on les transfère au large de 2 à 3 ans.
[Plan rapprochée sur l’intérieur d’une cage d’huîtres puis sur un homme qui prend des huîtres dans une poche de la cage.]
Puis, dans ce 2 à 3 ans-là, nous, on ramène les cages une à deux fois par année pour faire des tris de grosseur, nettoyer les cages aussi.
[Plan rapproché sur des huîtres, tenues dans une main.]
En fait, nous, on nettoie les cages régulièrement parce que ici, il y a beaucoup de moules qui vont se coller naturellement sur les poches d’huîtres, puis des algues aussi.
[Vue sur la poche remise dans la cage.]
Puis si on laisse ça aller, puis qu’on vient pas les chercher régulièrement, bien, ça va bloquer les pores des poches. Donc les huîtres, elles vont pouvoir mourir d’asphyxie.
[Plan sur Maggie.]
Elles vont manquer d’air, en fait, d’oxygène.
[Gros plan sur des huîtres puis sur Maggie qui parle à un groupe à bord du bateau.]
Puis en même temps, les huîtres, s’il y a un grain de sable qui rentre à l’intérieur, c’est là que ça devient un corps étranger, puis elle va vouloir se protéger. C’est là qu’elle va former une perle.
[Musique reprend. Vue sur une huître ouverte puis d’une femme qui goûte et apprécie l’huître, puis d’un homme qui sent une huître.]
[Vue sur des mains gantés qui prennent et montrent des parties de l’huître.]
Ici, ce qui est le fun, de les ramener une à deux fois par année, c’est que les huîtres, quand on les sort de l’eau ça leur cause un stress. Donc, c’est ça qui va causer les petites coches sur la coquille. Puis ça va faire une huître qui est beaucoup plus large, plus creuse aussi, puis plus facile à ouvrir.
[Plan rapproché sur les mains gantés qui montrent le bord externe de l’huître.]
Ici, on peut voir une croissance de l’huître. L’huître, elle va croître vers l’extérieur. Donc, c’est elle qui fait sa propre coquille. On voit vraiment la partie blanche, c’est… C’est sa croissance.
[Plan sur des coquilles d’huîtres ouvertes avec un couteau à huître à côté, suivi d’un plan rapproché sur le couteau gravé Trésor du Large.]
Puis l’huître, vu que c’est un mollusque qui est filtreur, ça va vraiment prendre le goût de son environnement.
C’est pour ça qu’il y a autant de variétés, que ça, d’huîtres.
[Plan sur une bâtisse bleue en bord de mer, un parking et des bateaux hors de l’eau.]
La variété, c’est le nom que l’entreprise donne à son huître.
[Plan sur un triage d’huîtres avec une prise de mesure, effectué à la main.]
Donc il y a aussi la méthode d’élevage qui va changer le coquillage de l’huître, qui va changer la couleur, qui va changer plein de choses.
[Plan sur une palette de boites en bois remplies d’huîtres puis sur quelqu’un qui vient sceller les boites et finalement plan rapproché sur le logo de la boite Trésor du Large.]
Alain : On voit tout l’amour et le temps et l’attention qui est donné aux huîtres.
[Plan sur Alain, sur le ponton en bois puis sur Maggie qui parle.]
Jusqu’à ce que ça soit sur les tablettes ou que les gens puissent les déguster. C’est vraiment passionnant.
[Vue sur un groupe de personnes à travers la vitre du bateau, puis sur les cages à bord, les huîtres et finalement, une huître ouverte.]
[Logo Exploramer.]
[Musique de fond s’arrête.]
Se procurer des
huîtres juvéniles
Chaque année, les ostréiculteurs s’approvisionnent en naissain.
Pour ce faire, ils ont deux possibilités:
Une fois ces huîtres juvéniles acquises, les ostréiculteurs les font grandir en les plaçant en mer, dans des poches flottantes ou des cages assez grandes pour permettre leur croissance.
Élever de
belles huîtres
Les huîtres ayant besoin de leur espace personnel pour s’épanouir, elles sont transférées dans des poches plus grandes après un an de croissance.
Ces poches seront placées sur le site d’élevage, riche en plancton et donc en nourriture.
À cette étape, les poches sont régulièrement tournées pour enlever les biosalissures. Les huîtres sont aussi triées et réorganisées périodiquement pour favoriser une croissance saine et homogène.
Trier, hiberner,
recommencer
Toutes les huîtres ne grandissent pas au même rythme.
Au printemps et en été, l’ostréiculteur trie ses huîtres par taille.
Vers octobre, à l’approche de l’hiver, les poches ne peuvent rester en surface à cause de la glace qui se forme. Les huîtres sont transposées dans des « poches de grossissement » plus grandes, et sont posées dans le fond de l’eau jusqu’au printemps.
Et ça recommence pendant une période 2 à 4 ans.
De petits êtres fragiles
En hiver, lorsque la température de l’eau descend sous 4° C, le métabolisme des huîtres ralentit. Elles cessent alors de filtrer l’eau et de se nourrir. Pas de panique, elles peuvent vivre assez longtemps dans ces conditions.
Par contre, si les poches d’huîtres sont remontées trop tôt au printemps, lorsque l’eau de la surface est encore glaciale, le stress subi par ces petits êtres serait trop important pour pouvoir s’en remettre.
Récolter, nettoyer,
chouchouter
Qu’elles soient cocktail, de luxe, normale ou commerciale, une fois la taille de vente atteinte, les huîtres peuvent être récoltées et triées une dernière fois.
Avant la vente, elles sont nettoyées pour enlever les balanes, les algues et autres organismes collés à leur coquille. Beaucoup de manipulations qui demandent de la délicatesse. Rappelons qu’il s’agit d’un animal vivant, et ce jusqu’à sa consommation.
La pisciculture a connu un essor dans les années 1980 et 1990.
Dans les années 2000, en raison de préoccupations environnementales, des règlementations plus strictes ont été mises en place, ce qui a réduit le nombre d’entreprises. En 2017, il en existait 87 au Québec, dont une trentaine arrivaient à vivre exclusivement de leur production piscicole.
Au Québec, cette culture se fait en eau douce, dans des bassins ou des étangs. Comme les autres types de culture, elle commence par la naissance des espèces.
Le pisciculteur peut se procurer des œufs de poisson à l’externe ou avoir des géniteurs dans son élevage et produire ainsi des œufs, à l’interne.
Ensuite, il veille à la croissance et à la santé des poissons jusqu’à ce qu’ils aient la taille souhaitée pour la vente.
Au Québec, la pisciculture est principalement destinée à l’alimentation ou au réapprovisionnement des milieux naturels et des étangs de pêche.
Les difficultés rencontrées par les mariculteurs, telles que le temps de mise en place ou la vulnérabilité face aux catastrophes naturelles, rendent cette pratique complexe. Toutefois, c’est un des savoir-faire des plus durables.
Pour continuer à profiter de ces produits incroyables, pour encore bien des années, quelques règles sont de rigueur…
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